30 Nov
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Le Sharenting en France

Mais qu’est-ce que le sharenting ? 

Le "sharenting*", mélange de "parenting" (parentalité) et "share" (partager), désigne la pratique de partager activement des informations sur ses enfants sur les réseaux sociaux. Cette tendance croissante soulève des questions fondamentales quant à la protection de la vie privée des enfants et des risques associés à cette exposition numérique.

La problématique du Sharenting - risques et conséquences sur les enfants

En France, la problématique du sharenting met en lumière une tension entre le désir de partager les moments significatifs des enfants et la nécessité de protéger leur vie privée. En effet, en exposant la vie quotidienne de leurs enfants sur les réseaux sociaux, les parents peuvent involontairement compromettre leur vie privée et les exposer à des dangers tels que le cyberharcèlement ou la pédocriminalité

“50 % des photographies qui s’échangent sur les forums pédopornographiques avaient été initialement publiées par les parents sur les réseaux sociaux” - Asli Ciyow, formatrice militante pour l’égalité des genres 

“Que ce soit en ligne ou à l’école, il est difficile d’ignorer le harcèlement que subissent des milliers d’enfants. Celui-ci est bien réel et a de multiples conséquences tels que que le décrochage scolaire, la dépression ou peut même advenir à des tendances suicidaires” - Asli Ciyow

De plus, les enfants peuvent ressentir une pression sociale pour correspondre à l'image façonnée par leurs parents sur les médias sociaux. 

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Campagne de la Police d'Assam en Inde générée par de l'IA

“Je pense que cela peut gravement affecter le développement de l’enfant. Déjà être affiché.e en permanence constant sur les réseaux sur les enfants est dangereux : car il ne peut pas donner son consentement et dans un deuxième temps les photos et vidéos de l’enfant peuvent tomber entre les mains de n’importe qui !” - témoignage de Maxendre - étudiant(e) en Marketing et Communication.

“En exposant son enfant, je considère que c’est une décision que l’on prend pour lui sans son consentement alors que cela peut affecter sa vie d’adulte plus tard. Peut-être que son enfant aura une volonté de préserver son image et sa vie privée, et en prenant la décision à sa place, on le prive de ce choix que l’on a pris nous personnellement”. - témoignage de Cerise, influenceuse

En France, selon certaines études, on estime qu'environ 70% des parents adhèrent d'une manière ou d'une autre au sharenting. Cette tendance souligne l'ampleur du phénomène et la nécessité de sensibiliser les parents aux implications à long terme de ce partage excessif sur la vie privée de leurs enfants.

“Je considère que l’exposition sur les réseaux sociaux est un choix qu’on fait en temps qu’adulte en tout connaissance de cause. On accepte que sa vie ou son image soit publique et ce n’est pas anodin.” - Cerise.

“Je sais que c'est toujours très tentant de vouloir poster des photos de nos enfants, nièces, neveux, petit·e·s enfants sur les réseaux. Mais à l'ère du numérique, de sa dangerosité et souvent d'une méconnaissance de ses limites, je me suis questionnée sur pourquoi il est important (pour ne pas dire vital) de ne plus/pas poster de photo de ses enfants ou des autres” - témoignage de Asli Ciyow , formatrice militante pour l’égalité des genres 

“En 2023, on a vu arriver les IA qui prouvent aussi que plus tard, la mise à disposition publique de son image aura de plus en plus de conséquences. Je ne veux pas imposer ça à mon enfant.” - Cerise

Conclusion

Alors que le sharenting continue de gagner en popularité en France, il est essentiel que les parents réfléchissent attentivement aux conséquences de cette pratique. Par ailleurs, une proposition de loi visant à protéger le droit à l’image des enfants a été adoptée par l’Assemblée nationale en mars 2023. Cette loi prévoit la possibilité pour un juge de retirer l’exercice du droit à l’image de l’enfant à un parent qui aurait porté atteinte à sa dignité ou à son intérêt. Elle vise à sensibiliser les parents aux risques du sharenting et à responsabiliser les plateformes numériques.

“Les enfants ont le droit à une vie privée, surtout à l’ère du numérique. Iels ont le droit de grandir en sachant que leur image n’a pas été utilisée à des fins qui ne mettent même pas leur propre bien-être en priorité” - Asli Ciyow

Pour aller plus loin, voici un épisode de podcast enregistré avec Babet de Not just mom et Ketsia du collectif Féminisme contre le cyberharcèlement.

*Le terme est utilisé dès 2012 par le journaliste américain Steven Leckart dans le Wall Street Journal

Cet article est signé Absana L.