Cheveux afro et santé : ce que les produits nous cachent
Le 22 novembre 2024, nous avons organisé un atelier pour discuter du lien entre santé et produits capillaires.
La genèse de cet événement est simple : depuis l’avènement du mouvement Nappy, des réseaux sociaux, et de la multitude de produits disponibles, on entend beaucoup parler d’amour et d’acceptation des cheveux afro. Mais une question reste largement absente des débats : quels sont les effets des produits capillaires que nous utilisons quotidiennement sur notre santé ?
Comme beaucoup de femmes noires, j’ai grandi avec une routine capillaire bien remplie : crèmes, défrisants, clarifiants, masques, huiles, après-shampoings, gels pour les boucles… Les placards de ma maison débordaient de produits, sans que je ne m’interroge sur leur composition.
Aujourd’hui, je fais beaucoup plus attention à ce que je consomme : alimentation, produits ménagers, soins corporels. Mais honnêtement, ce n’est que récemment que j’ai commencé à me poser des questions sur mes produits capillaires. Et ce déclic, je voulais le partager avec d’autres personnes, car nos cheveux méritent autant d’attention que le reste de notre corps.
La composition des produits capillaires : des dangers souvent ignorés
De nombreux produits destinés aux cheveux afro contiennent des ingrédients préoccupants, notamment des perturbateurs endocriniens, des parabènes, des phtalates, et du formaldéhyde. Ces substances, souvent utilisées comme conservateurs ou pour leurs propriétés esthétiques, sont associées à des risques pour la santé : perturbations hormonales, allergies, et même un risque accru de cancers.
Prenons les parabènes, par exemple. Ils imitent les œstrogènes dans le corps et augmentent les risques de cancers hormonodépendants, comme le cancer du sein. Ce qui est inquiétant, c’est que beaucoup d’entre nous ont été exposées à ces substances depuis l’enfance, parfois même avant la naissance, si nos mères utilisaient des défrisants pendant leur grossesse.
Selon l'Anses, ces substances sont particulièrement problématiques car elles sont appliquées directement sur le cuir chevelu, une zone très sensible. En réponse, des mesures devraient entrer en vigueur en 2024 pour interdire certains ingrédients à risque, notamment dans les produits de lissage. Mais ce n’est qu’un début.
Les défrisants : un risque accru
Les défrisants, largement utilisés pour lisser les cheveux crépus, sont parmi les produits les plus problématiques. Une étude menée par l’Université de Boston a révélé que leur utilisation fréquente peut augmenter le risque de cancer de l’utérus. La raison ? La présence de substances chimiques comme le formaldéhyde, classé cancérogène avéré.
Et ce n’est pas tout : en plus des risques à long terme, les défrisants peuvent causer des irritations, des brûlures du cuir chevelu et des dommages irréversibles aux cheveux. Malheureusement, les femmes noires sont les principales utilisatrices de ces produits, souvent sous la pression des normes esthétiques.
Les extensions : un autre danger caché
Autre découverte récente pour moi : les extensions capillaires, que beaucoup d’entre nous utilisent pour les tresses, posent aussi des risques. Les matériaux synthétiques peuvent contenir des substances irritantes, provoquant démangeaisons, allergies ou même des brûlures du cuir chevelu.
Et puis, il y a le poids des extensions. Vous savez sûrement de quoi je parle : ces tresses lourdes qui tirent sur les racines et peuvent entraîner une alopécie de traction si on n’y prend pas garde. Une condition qui, si elle n’est pas traitée, peut devenir permanente.
Une histoire de (dés)amour avec les cheveux afro
Bien que l’objectif principal de l’atelier ait été de parler de santé, un autre sujet a dominé les discussions : notre rapport au cheveu afro.
Lors du tour de table, chaque participante a partagé son histoire. Ce qui est revenu pour toutes, c’est à quel point le regard des autres peut influencer notre relation avec nos cheveux. Ce regard détermine souvent l’amour qu’on leur porte – ou pas – à certaines périodes de notre vie, et impacte directement les soins qu’on leur accorde.
Ces échanges ont montré que la santé capillaire est indissociable de l’estime de soi. Et encore aujourd’hui, dans certains environnements, porter ses cheveux naturels reste un acte politique.
Pour minimiser les risques et adopter une routine plus respectueuse de notre santé et de nos cheveux, voici quelques conseils :
- Lisez les étiquettes : Décryptez les compositions et évitez les ingrédients nocifs comme les parabènes, les phtalates ou le formaldéhyde. Les applications comme Yuka peuvent vous aider.
- Choisissez des produits naturels : Privilégiez les soins à base d’huiles végétales, de beurre de karité ou d’aloe vera.
- Alternez vos coiffures : Évitez les styles trop serrés ou les extensions lourdes pour protéger vos racines.
- Prenez soin de votre cuir chevelu : Massez-le régulièrement, hydratez-le et utilisez des produits doux.
- Hydratez-vous et adoptez une hygiène de vie saine : Une bonne alimentation, une hydratation suffisante et une activité physique favorisent des cheveux en bonne santé.
- Prenez soin de votre santé mentale : Pendant l’atelier, notre thérapeute capillaire a rappelé que le stress, le manque de sommeil et les mauvaises habitudes de vie impactent directement la santé de nos cheveux.
Pour en revenir à l’atelier, il s’est terminé sur une note inspirante : nous avons toutes convenu que nos cheveux sont bien plus qu’un simple choix esthétique. Ils sont une partie de notre identité et un symbole de résilience.
Comme l’a si bien dit Asmaa, l'animatrice de cette soirée :
"I am the queen of my life, and I must wear my crown proudly."
Pour aller plus loin, voici une liste de lectures proposée par Asmaa.
Article signé : Tsippora